Le mois de juin 2025 a été marqué par deux annonces successives de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAM) qui suscitent l’incompréhension, voire la colère, chez de nombreux infirmiers et infirmières libérales. Entre la restriction brutale des cotations liées aux perfusions et la proposition du remplacement d’un départ sur deux en zone surdotée, la profession se sent à nouveau fragilisée, invisibilisée, et instrumentalisée à des fins purement comptables.
Une circulaire qui taille dans les cotations des perfusions
Parue le 25 juin 2025, la circulaire CIR-9-2025 impose une modification majeure dans la cotation des perfusions longues : désormais, une seule cotation AMI 14 par jour est autorisée, même en cas de deux actes distincts, réalisés à des horaires différents, tous deux prescrits médicalement.
Cela signifie concrètement que, lorsqu’une IDEL réalise deux perfusions longues dans la même journée chez un même patient (ce qui n’a rien d’exceptionnel), elle ne pourra facturer qu’un seul AMI 14.
Jusqu’ici, chaque perfusion — distincte, justifiée, préparée, surveillée — ouvrait droit à une cotation complète. Aujourd’hui, seule la première est reconnue et les suivantes reléguées à des actes secondaires bien moins rémunérés (AMI 4.1 ou fractions d’actes).
D’autres exemples présents dans la circulaire confirment la baisse généralisée de valorisation :
- Interruption temporaire de perfusion : cotée désormais AMI 4.1 au lieu de AMI 5
- Association perfusion d’antalgiques + NaCl : cotée AMI 9 + AMI 4.1/2, contre AMI 14 + AMI 9 jusqu’à présent
Cette décision, contestée dans sa méthode comme dans ses effets, provoque un sentiment d’humiliation chez les professionnels : même travail, même responsabilité, mais moitié moins de reconnaissance financière.
Vers un plafonnement des installations IDEL en zone surdotée
Autre annonce d’ampleur passée (presque) inaperçue : dans son rapport « Charges et Produits 2026 », la CNAM propose une nouvelle restriction pour l’installation des IDEL.
En zone surdotée, seul un départ sur deux serait remplacé.
Autrement dit, lorsqu’une infirmière libérale quitte une zone où l’offre de soins est jugée trop dense, une seule installation sera autorisée tous les deux départs.
Si cette mesure vise à éviter des déséquilibres géographiques, ses conséquences pourraient être lourdes :
- Blocage des jeunes diplômés dans leur projet d’installation
- Saturation dans les zones déjà tendues
- Moins de cotisants actifs à la CARPIMKO = mise en péril à terme du système de retraite des professionnels paramédicaux
Cette logique purement démographique ne tient aucun compte de la réalité du terrain : les départs ne sont pas toujours remplacés et la pression sur les soignants restants continue d’augmenter.
Une réponse ferme de la profession
Face à ces mesures, plusieurs syndicats professionnels annoncent déjà des recours juridiques et interpellent le ministère de la Santé. Le discours est clair : ces décisions sont perçues comme un mépris pour l’exercice infirmier libéral, déjà fragilisé par l’absence de revalorisation des actes depuis des années.
Pendant ce temps, les infirmiers et infirmières, sur le terrain, assurent la continuité des soins, pallient les déserts médicaux et assurent les missions les plus délicates, sans que leur expertise ne soit reconnue à sa juste valeur.
En conclusion : une profession qui mérite mieux
À l’heure où l’on parle de « consultation infirmière », de « diagnostic clinique autonome » et d’« accès direct aux soins », comment peut-on justifier une baisse des cotations sur des actes essentiels comme les perfusions ? Et comment accompagner l’évolution du métier tout en bloquant l’installation des jeunes en libéral ?
Sur le blog de dossierdesoins.fr, nous sommes aux côtés des IDEL qui, chaque jour, gèrent l’urgence, accompagnent la douleur, prennent soin, coordonnent. Cette série de décisions récentes est à la fois incompréhensible sur le fond et insupportable sur la forme.
C’est une question de dignité, de cohérence clinique et d’avenir de la profession infirmière libérale.
Cet article a été rédigé pour le blog de dossierdesoins.fr, dans le but d’informer et de soutenir la communauté infirmière face aux évolutions législatives de la profession.